Le fleuve Niger représenta une artère importante pour le commerce allant du Sahara à l’Afrique de l’Ouest. Le commerce du fleuve Niger rejoignait des routes terrestres par la forêt ouest-africaine et par la région du Soudan central. Dans cette section, les sites Igbo-Ukwu, Ife et Durbi Takusheyi sont présentés sous forme d’études de cas qui nous aident à comprendre l’histoire de l’Afrique de l’Ouest africaine.
Au delà du Sahara, les routes du commerce s’étendaient jusqu’à la forêt tropicale d’Afrique de l’Ouest, jusqu’au Soudan central et jusqu’en Europe. À la moitié du quatorzième siècle, le voyageur et diplomate Ibn Battuta mentionna le parcours du fleuve Niger jusqu’à la ville d’Ife dans la zone forestière d’Afrique de l’Ouest, affirmant “puis le fleuve Niger descend de Dia jusqu’à Tombouctou, puis jusqu’à Gao […] et Ife. Ife est l’une des plus grandes campagnes du Soudan, et leur sultan est l’un des plus grands.”30 Les fouilles archéologiques sur les sites médiévaux au Nigéria apportent des preuves matérielles de ce parcours. Les sites d’Igbo Ukwu (du huitième au douzième siècle), d’Ile-Ife (du treizième au quatorzième siècle) et de Durbi Takusheyi (du quatorzième au quinzième) révèlent l’importance du cuivre, de l’ivoire, et des perles de verre parmi les biens qui circulaient dans de multiples directions de courte et de longue distance, à l’époque médiévale.
Igbo Ukwu se situe à l’est du fleuve Niger dans la région forestière du Nigéria. Les sculptures en alliage de cuivre et les plus de 165 000 perles en verre et en cornaline découvertes sur le site indiquent la présence d’industries autonomes de production verrière et de moulage métallique, qui étaient en relation avec les réseaux actifs de commerce local et interrégional, et qui fournissaient les matières premières pour la production artisanale.
Ife, au Niger central, était le centre politique et cérémonial d’un royaume soutenant une économie régionale multiethnique s’étendant jusqu’à 190 kilomètres au nord du fleuve Niger. Les ateliers de verrerie, de cuivre, d’alliage de cuivre et de sculptures en terre cuite produisaient des œuvres d’art en quantité abondante à Ife et sur d’autres sites aux alentours de cette puissante cité.
Durbi Takusheyi, au nord du Nigéria, est située à mi-chemin entre le fleuve Niger et le Lac Tchad. Les premiers documents sur les royaumes haoussa, qui finiraient par dominer la région entre le seizième et le dix-neuvième siècle, y ont été retrouvés. Des sépultures ainsi que du mobilier funéraire ont été retrouvés pendant les fouilles de Durbi Takusheyi, et attestent des interactions internationales.
Personnage se tenant debout, culture Nok, Nigéria, Ier millénaire av. J.-C. Terre cuite, 68 cm de hauteur. National Commission for Museums and Monuments, Abuja, Nigéria, IFA 1 881–1885. Photographie de Stefan Rühl, Werbefotografie Rühl & Bormann, Darmstadt. Photographie © Goethe-Universität Frankfurt, Institut für Archäologische Wissenschaften, Archäologie und Archäobotanik Afrikas, Allemagne
Cette figurine représentant un personnage debout et appartenant à la culture Nok, au centre-nord du Nigéria, est l’une des plus anciennes sculptures en terre cuite connues ayant été découverte sur un site en Afrique.31 Datée du premier siècle, elle est l’une des 1 000 figurines retrouvées dans la région qui prouvent l’existence d’une riche culture matérielle au Soudan central bien avant l’époque médiévale. Ce personnage est représenté portant un collier et une ceinture de perles. Ceci prouve que les perles étaient déjà bien ancrées dans la culture de l’époque, étant associées au pouvoir et à la richesse, avant que le commerce transsaharien médiéval n’accroisse l’offre de perles de verre dans la région. Celles-ci sont probablement des perles en pierres semi-précieuses, retrouvées en abondance sur les sites de Nok.
Le corpus de sculptures de Nok, considérées comme étant les premières sculptures connues découvertes au sud du désert du Sahara, fait partie des plus anciennes traditions ayant été menacées par le pillage illégal de l’Afrique de l’Ouest. La protection de ces sculptures et d’autres exemples du patrimoine culturel matériel et immatériel est primordiale pour transmettre cet héritage aux générations futures.